It's nice to meet you___

«Tous ces soins, tout cet orgueil, tous ces livres pleins de héros, c' était donc pour en arriver là ? Être un homme, comme tu dis, et trop heureux de vivre ?»
Antigone, de Jean Anouilh.

Voici ce que criait Hémon à son père, dans la tragédie d'Antigone. Le Hémon d'Antigone. «Un Hémon dur et jeune; un Hémon exigeant et fidèle.». Qu'en était-il de William, pendant qu'il lisait ces mots, adossé au tronc d'un arbre, à Wellington Park ? Le coeur serré, il imaginait cet adolescent devenir un homme, passant par une étape clef, une sorte de désillusion que tout le monde ressent à propos des parents, quand on réalise enfin qu'ils ne sont ni des héros, ni des dieux, mais de simples humains comme les autres. Enfin, humains, pour la plus grande partie d'entre eux en tout cas... Hémon souffrait de se rendre compte de cela trop brutalement, et le lycan, au contraire, ne savait pas si pour lui le fait que son père soit un moins que rien avait toujours été présent, parce qu'il l'avait abandonné, ou s'il peinait encore à s'en rendre compte, parce qu'il n'avait pas passé de temps avec lui.

William ferma les yeux, et, appuyant sa tête contre le tronc de l'arbre, il poussa un profond soupir. Soupir qui semblait être de trop dans cette belle nature matinale. Belle, le mot est un euphémisme, la nature qui l'entourait était splendide, même si elle n'était pas très sauvage, le fait de se retrouver dans l'herbe procurait un bien fou au lycan, qui avait régulièrement besoin d'espaces verts et d'un minimum de liberté. Rester toujours enfermé dans cette ville atroce qui empestait encore de l'odeur de la guerre le rendrait fou, s'il n'avait un endroit où se rendre de temps en temps. Généralement, le parc était emplit de cris d'enfants et de bien trop de présences, c'est pourquoi William s'y était rendu de bonne heure.

L'air était frais, mais pas froid, on devinait que la température dans la journée serait assez haute, mais pour l'instant. L'herbe était rase, d'une couleur verte-émeraude époustouflante, et si douce qu'y passer la main était agréable. La lumière et le parfum qui flottait dans l'air étaient doux, et rien que cela suffisait à faire oublier à William l'homme (ou plutôt le lycan) qu'il était. Les jours, les semaines, les mois de solitude et de chagrin, les vampires, Eurydice particulièrement qu'il avait encore croisé il y a peu, la colère, l'impatience, le sentiment d'instabilité, les souvenirs de la guerre, le chagrin, la folie, le désespoir, tout cela semblait l'avoir quitté, et il se sentait désormais parfaitement calme, sûr de lui, alors il rouvrit les yeux, de nouveaux prêt à affronter le monde, quel que soit les choses qui l'attendaient.

Spoiler:

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